Page:Stirner - L’Unique et sa propriété, trad. Reclaire, 1900.djvu/109

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n’obéissant qu’à la légalité, il bâillonne, il muselle la voix de l’anarchie : l’Esprit de moralité et de légalité, maître inflexible et inexorable, le tient captif. C’est l ce qu’ils appellent la « royauté de l’Esprit » — c’est en même temps le point d’appui de l’Esprit.

Et qui messieurs les Libéraux veulent-ils libérer ? Quelle est la liberté qu’ils appellent de tous leurs vœux ? Celle de l’Esprit, de l’esprit de moralité, de légalité, de piété, etc. Mais messieurs les Antilibéraux n’ont pas d’autre désir, et le seul objet de la dispute, c’est l’avantage, que chacun ambitionne, d’avoir seul la parole. L’Esprit reste le maître absolu des uns et des autres, et s’ils se querellent, c’est uniquement pour savoir qui s’assiéra sur le trône héréditaire de « lieutenant du Seigneur ».

Ce qu’il y a de meilleur dans l’affaire, c’est qu’on peut rester tranquille spectateur de la lutte, avec la certitude que les bêtes féroces de l’histoire s’entre-déchirent juste comme celles de la nature ; leurs cadavres en se putréfiant engraisseront le sol pour — nos moissons.

Nous reviendrons par la suite sur une foule d’autres marottes : Vocation, Véracité, Amour, etc.



Si j’oppose la spontanéité de l’inspiration la passivité de la suggestion, et ce qui nous est propre à ce qui nous est donné, on aurait tort de me répondre que, tout tenant à tout et l’univers entier formant un tout solidaire, rien de ce que nous sommes ou de ce que nous avons n’est par conséquent isolé, mais nous vient des influences ambiantes et nous est en somme « donné » ; l’objection porterait à faux, car il y a une grande différence entre les sentiments ou les pensées que ce qui m’entoure éveille en moi, et les sentiments et les pensées qu’on me fournit tout faits.