Page:Stirner - L’Unique et sa propriété, trad. Reclaire, 1900.djvu/180

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pu lutter ; il a eu la chance de ne rencontrer sur sa route personne de mieux — doué.

Ces gens qui, sans y voir de mal, passent leur vie ballottés par le flux et le reflux de la « veine » sont saisis de la plus vertueuse indignation quand leur propre principe se révèle sous son vrai jour de jeu de hasard en leur « portant malheur ». Un cornet de dés est une image de la concurrence beaucoup trop nette, trop peu déguisée ; comme toute nudité, elle offense la décence et la pudeur.

C’est à ces caprices de la fortune que les Socialistes veulent mettre un terme, en fondant une société où les hommes ne soient plus le jouet de la chance. Tout naturellement, cette tendance se manifeste tout d’abord par la haine des « malheureux » contre les « heureux », c’est-à-dire de ceux pour lesquels le hasard n’a que peu ou rien fait contre ceux qu’il a comblés. Mais la mauvaise humeur du malchanceux ne s’adresse pas tant à celui qui a de la chance qu’à la chance elle-même, cette colonne pourrie de l’édifice bourgeois.


Les Communistes, partant de ce principe que l’activité libre est l’essence de l’homme, ont besoin du dimanche qu’exige comme compensation leur pensée des jours ouvrables. Il leur faut le dieu, l’élévation et l’édification que réclame tout effort matériel pour mettre un peu d’esprit dans leur travail de machines.

Si le Communiste voit en toi un homme et un frère, ce n’est là que sa manière de voir des dimanches ; les autres jours de la semaine il ne te regarde nullement comme un homme tout court, mais comme un travailleur humain ou un homme qui travaille. Si le premier point de vue s’inspire du principe libéral, le second recèle l’illibéralité. Si tu étais un « fainéant », il ne reconnaîtrait pas en toi l’homme, il y verrait un « homme paresseux » à corriger de sa paresse, et à catéchiser pour le convertir à la croyance