Page:Stirner - L’Unique et sa propriété, trad. Reclaire, 1900.djvu/232

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La liberté vous dit : faites-vous libres, allégez-vous de tout ce qui vous pèse ; elle ne vous enseigne pas ce que vous êtes vous-mêmes. « Libre ! Libre ! » est son cri de ralliement, et vous pressant avidement sur ses pas, vous vous faites libres de vous-mêmes, « vous faites abnégation de vous-mêmes ». L’Individualité, elle, vous rappelle à vous, elle vous crie : « Reviens à toi ! » Sous l’égide de la liberté, vous êtes quittes de bien des choses, mais voici que quelque chose vous opprime de nouveau : « Affranchissez-vous du mal, le mal est resté. » Comme individu, vous êtes réellement libre de tout ; ce qui vous reste inhérent, vous l’avez accepté de votre plein choix et de votre plein gré. L’ « individuel » est. foncièrement libre, libre de naissance ; le « libre » n’est qu’en mal de liberté, c’est un rêveur et un enthousiaste.

Le premier est originellement, essentiellement libre, parce qu’il ne reconnaît que lui ; il n’a pas à commencer par s’affranchir, parce que, a priori, il rejette tout hors de lui, parce qu’il n’apprécie que lui, ne met rien au-dessus de lui, bref, parce qu’il part de lui-même et arrive à lui-même. Dès l’enfance, contenu par le respect, il lutte déjà pour s’affranchir de cette contrainte. L’individualité se met à l’œuvre chez le petit égoïste et lui procure ce qu’il désire, la — liberté.

Des siècles de culture ont obscurci à vos yeux votre vraie signification et vous ont fait croire que vous n’êtes pas des égoïstes, que votre vocation, est d’être des idéalistes, de « braves gens ». Secouez tout cela ! Ne cherchez pas dans l’abnégation une liberté qui vous dépouille de vous-mêmes, mais cherchez-vous vous-mêmes, devenez des égoïstes, et que chacun de vous devienne un Moi tout-puissant. Plus nettement : refaites connaissance avec vous-mêmes, apprenez à connaître ce que vous êtes réellement et abandonnez vos efforts hypocrites, votre manie insensée d’être autre chose que ce que vous êtes. J’appelle vos efforts