Page:Stirner - L’Unique et sa propriété, trad. Reclaire, 1900.djvu/312

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est le — prince. Princes et Peuples ne peuvent subsister que tant qu’ils ne s’identifient pas. Quand plusieurs Peuples sont réunis sous une même constitution, comme cela s’est vu par exemple dans l’ancienne monarchie perse et se voit encore aujourd’hui, ces « Peuples » ne comptent plus que pour des « provinces ». En face de Moi, en tout cas, le Peuple n’est qu’une puissance — fortuite ; c’est une force de la nature, un ennemi que je dois vaincre.

Que faut-il entendre par un peuple « organisé » (id., p. 132) ? Un Peuple « qui n’a plus de gouvernement » et qui se gouverne lui-même. Donc, dans lequel aucun Moi ne dépasse le niveau, un Peuple organisé par l’ostracisme. L’ostracisme, le bannissement des « Moi », fait du peuple son propre gouverneur.

Si vous parlez d’un Peuple, il faut aussi parler d’un prince, car pour être, pour vivre et pour faire de l’histoire le Peuple doit, comme tout ce qui agit, avoir une tête, un « chef ». C’est ce que Proudhon exprime en disant : « Une société pour ainsi dire acéphale ne peut vivre  ».

On invoque à chaque instant aujourd’hui la vox populi ; l’« opinion publique » doit gouverner les princes. Il est bien certain que la vox populi est en même temps vox dei ; mais à quoi bon l’une et l’autre ? Et la vox principis n’est-elle pas aussi vox dei ?

On peut ici se rappeler les « Nationalistes ». Vouloir faire des trente-huit États de l’Allemagne une nation est aussi absurde que d’entreprendre de réunir en un seul essaim trente-huit essaims d’abeilles conduits par leurs trente-huit reines. Toutes sont des abeilles, mais ce n’est pas en tant qu’abeilles qu’elles tiennent les unes aux autres et peuvent s’unir : elles sont simplement, comme abeilles sujettes, liées à leurs souveraines, les reines. Abeilles et Peuples sans