Page:Stirner - L’Unique et sa propriété, trad. Reclaire, 1900.djvu/403

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etc., à trahir la foi de leurs pères — toujours pour l’amour de Dieu ? Y aurait-il un grand mal à ce que tout cela se fît pour l’amour de moi ? Que signifie donc pour l’amour de moi ? Tout d’abord cela donne l’idée d’une « spéculation ignoble ». Celui qui spécule en vue d’un « gain sordide » le fait en effet pour l’amour de soi (puisqu’il n’est en somme rien que l’on ne fasse pour l’amour de soi, par exemple, tout ce que l’on fait « à la plus grande gloire de Dieu ») ; mais ce soi-même pour lequel il recherche le gain est l’esclave du gain, il ne s’élève pas au-dessus du gain, il appartient au gain, au sac d’argent, et ne s’appartient pas, il n’est pas son maître. Un homme que gouverne la passion de l’avarice ne doit-il pas obéir aux ordres de cette maîtresse ? Si, une fois en passant, il se laisse aller à une généreuse faiblesse, cela ne paraîtra-t-il pas tout simplement une exception, juste comme lorsque de fidèles croyants à qui vient à manquer la conduite de leur maître tombent dans les embûches du « diable » ? Donc un avare n’est pas son possesseur ; il est esclave, et il ne peut rien faire pour l’amour de soi sans le faire en même temps pour l’amour de son maître, tout comme celui qui craint Dieu.

Le parjure de François ler envers l’empereur Charles-Quint est célèbre. Ce n’est pas quelque temps après, en réfléchissant mûrement à la promesse faite, c’est immédiatement, au moment même où il prêtait serment, que François la rétracta tacitement par une restriction mentale à laquelle avaient d’avance souscrit ses conseillers. Le parjure fut prémédité. François était tout disposé à acheter sa liberté, mais le prix qu’en exigeait Charles lui paraissait trop élevé et déraisonnable. J’admets que Charles fut dupe de son avarice, en cherchant à soutirer de son prisonnier la plus grosse somme possible, mais il n’en fut pas moins misérable de la part du roi de vouloir racheter sa liberté au prix d’une rançon plus