Page:Stirner - L’Unique et sa propriété, trad. Reclaire, 1900.djvu/450

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pour eux-mêmes ou m’en imposer le moins du monde, je n’ai rien de plus urgent, que de les faire rentrer dans leur néant, c’est-à-dire en Moi. leur créateur. Dieu Jésus-Christ, la Trinité, la Moralité, le Bien, etc.. sont de ces créatures dont je ne dois pas seulement me permettre de dire qu’elles sont des vérités, mais dont je dois me permettre tout aussi bien de dire que ce sont des illusions. Si j’ai, à un moment donné, voulu et décrété leur existence, il faut de même que je puisse, à un autre moment, vouloir et décréter leur non-existence. Je ne puis les laisser croître par-dessus ma tête, je ne puis avoir la faiblesse de les laisser devenir quelque chose d’ « absolu » ce qui les soustrairait à ma puissance et m’interdirait de décider souverainement, de leur sort. Je tomberais ainsi sous le joug du principe de stabilité, du principe vital par excellence de la Religion, qui prend à cœur de créer des « sanctuaires inviolables », des « vérités éternelles », un « sacro-saint » en un mot, et de dépouiller chacun de ce qui est à lui.

L’objet fait de nous des possédés : cette influence, il l’exerce aussi bien lorsqu’il se présente à nous sous une forme sacrée que sous une forme non sacrée, et comme objet suprasensible que comme objet sensible. À l’objet, quel qu’il soit, répond chez nous un désir : convoitise sensuelle ou vœux idéaux, soif de l’or et aspiration vers le ciel doivent être mis sur la même ligne. Alors que les propagateurs de la lumière voulaient gagner les gens au monde sensible. Lavater prêchait l’appétit de l’invisible.


Les uns veulent émouvoir et les autres mouvoir.

Chacun se fait des objets une idée particulière. Dieu, Jésus-Christ, le monde, etc., ont été et seront conçus des façons les plus diverses. Chacun est en cela « hétérodoxe », et il a fallu des guerres sanglantes avant que des vues opposées sur un même objet en vinssent à ne plus être jugées des hérésies qui méritaient la mort. Les hétérodoxes se tolèrent. Mais