Page:Stirner - L’Unique et sa propriété.djvu/117

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tromperie, par des stratagèmes de tout genre, etc.

Au contraire dans le respect il y a autre chose. Ici, l’on ne craint pas seulement, on rend aussi hommage. L’être redouté est devenu une puissance intérieure à laquelle je ne puis plus me soustraire ; je l’honore, je suis pris par lui, je lui suis soumis, je lui appartiens : par l’honneur que je lui paie en tribut je suis complètement en son pouvoir et je ne tente même pas de m’en affranchir. J’y adhère maintenant de toute la force de la foi ; je crois. Moi et ce que je respecte sommes un ; « ce n’est pas moi qui vis, mais le Respecté qui vit en moi ! » L’esprit, l’infini, ne pouvant jamais prendre fin reste statutaire ; il craint la mort, il ne peut plus se décider à quitter son petit Jésus, son œil ébloui ne reconnaît plus la grandeur de ce qui est fini ; ce qu’on craignait, exalté maintenant jusqu’à la vénération, est devenu inviolable : le respect est éternisé, le respect est divinisé. L’homme maintenant ne crée plus, il apprend (il veut connaître, scruter, etc.) en d’autres termes il s’occupe d’un objet solide dans lequel il s’abîme sans faire retour sur lui-même. Il cherche à l’examiner, à le connaître, à l’approfondir, et non pas à le décomposer, à le détruire. « L’homme doit être religieux » voilà qui est solidement établi ; par suite on se borne à questionner sur le moyen d’y atteindre, sur le vrai sens de la religiosité, etc. C’est tout autre chose quand c’est l’axiome lui-même que l’on met en question et que l’on tire en doute, au risque de le renverser.

La morale est une de ces idées saintes, on doit être moral et se borner à rechercher la véritable façon de l’être. En face de la morale on ne se hasarde pas à demander, si elle n’est pas elle-même un mirage trompeur. Elle demeure supérieure à tous les doutes, im-