Page:Stirner - L’Unique et sa propriété.djvu/213

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exprime catégoriquement cette tantologie que c’est précisément l’Inhumain.

Mais qu’arriverait-il si l’Inhumain se tournant résolument le dos à soi-même, se détournait aussi du critique qui cherche à l’inquiéter et, sans se laisser ébranler par ses discours, le laissait en plan ? « Tu me nommes l’Inhumain, pourrait-il lui dire, je le suis en effet… pour toi, mais je ne le suis que parce que tu me poses en contraste avec l’humain, et je ne pouvais me mépriser qu’autant que je subissais cette comparaison. J’étais méprisable parce que je cherchais mon « meilleur moi » hors de moi. J’étais l’Inhumain, parce que je rêvais de l’Humain ; j’étais pareil aux gens pieux qui ont faim de leur « vrai moi » et restent toujours « de pauvres pécheurs ». Je ne me pensais toujours que par rapport à un autre, bref, je n’étais pas absolument tout pour moi, je n’étais pas l’unique. Mais maintenant je cesse de me présenter à moi-même comme étant l’Inhumain, je ne veux plus me mesurer ni me laisser mesurer à l’homme. Je ne reconnais plus rien au-dessus de moi — et ainsi Dieu l’a ordonné, ô Critique humain. Je n’ai été qu’accidentellement l’Inhumain, je ne le suis plus maintenant, mais je suis l’unique et même, ce qui est pour toi une abomination, je suis l’égoïste, non pas l’égoïste qui se mesure à l’Humain et au Désintéressé, mais l’égoïste dans le sens de — l’Unique. »

Il nous faut encore examiner une nouvelle proposition du même recueil. « Le critique n’établit aucun dogme et ne veut apprendre à connaître que les choses. »

Le critique craint de devenir « dogmatique » ou d’établir des dogmes. Naturellement, il deviendrait par là le contraire du critique ; si bon critique qu’il fût, il deviendrait mauvais, et de désintéressé égoïste.