Page:Stirner - L’Unique et sa propriété.djvu/419

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Dieu. Ceux-là qui, pendant six jours, foulaient tout aux pieds pour atteindre à leurs but égoïstes, le septième, sacrifiaient au Seigneur, ceux-là qui, de leur pensée impitoyable, détruisaient cent « bonnes causes », agissaient ainsi pour servir « une autre bonne cause » et devaient, en dehors d’eux-mêmes, penser encore à un autre qui tirerait son bonheur de leur satisfaction personnelle, penser au peuple, à l’humanité, etc. Mais cet autre est un être au-dessus d’eux, un être très haut, ou suprême, c’est pourquoi je dis qu’ils font tous ces efforts pour l’amour de Dieu.

Par suite, je puis dire que la dernière raison de leurs actions est l’amour. Non pas un amour volontaire qui leur doit propre, mais un amour tributaire dont le Suzerain est l’Être Suprême (Dieu, qui est l’amour même) bref, non pas l’amour égoïstique, mais l’amour religieux, un amour né de l’illusion que l’on doit payer son tribut à l’amour, c’est-à-dire que l’on ne peut être « égoïste ».

Quand nous voulons délivrer le monde de maintes servitudes, ce n’est pas pour lui, mais pour nous que nous le voulons : car nous ne sommes pas, de profession et « par amour », des libérateurs du monde et nous voulons seulement le conquérir sur d’autres. Nous voulons nous l’approprier ; il ne doit pas plus longtemps rester serf de Dieu (de l’Église) ou de la loi (de l’État) ; il faut qu’il soit notre bien propre, c’est pourquoi nous cherchons à le « gagner », à le prévenir en notre faveur ; sa force qu’il tourne contre nous, nous cherchons à l’achever, à la rendre surabondante, en accourant à lui et en nous « rendant » à lui aussitôt qu’il nous a entendus. Si le monde est nôtre, il ne cherchera plus à exercer sa force contre nous