Page:Stirner - L’Unique et sa propriété.djvu/424

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ne doive rester en arrière. Mais de qui donc sera-ce le bien ? Tous ont-ils un seul et même bien, et tous se trouvent-ils également satisfaits d’un bien unique ? S’il en est ainsi, c’est le « vrai bien ». Mais n’arrivons-nous pas précisément par là au point où la religion commence à exercer sa domination ? Le christianisme dit : ne regardez pas les frivolités de la terre, mais cherchez votre bien véritable — soyez de pieux chrétiens : l’état chrétien est le souverain bien. C’est le vrai bien de « tous », parce que c’est le bien de l’homme en soi (ce fantôme). Maintenant le bien de tous doit-il être aussi mon bien et ton bien ? Mais si moi et toi ne considérons pas ce bien comme notre bien, se souciera-t-on alors de ce qui constitue notre bien ? Loin de là, la société a décrété certain bien comme « le vrai bien » et si, par exemple, elle donnait ce nom à la jouissance honnêtement acquise par le travail et que tu préférasses la jouissance dans la paresse, le plaisir sans travail, la société, qui a souci du bien de tous, se garderait sagement de te donner ce qui fait ton bonheur. La communauté, en proclamant le bien de tous, détruit le bien-être de ceux qui vivaient jusque là de leurs rentes et qui se trouvaient infiniment mieux à ce régime que de la perspective de travail forcé que leur offre Weitling. Ce dernier affirme que le bien de millions d’hommes ne peut consister dans le bien de quelques milliers et que ceux-ci doivent abandonner leur bien particulier « en vue du bien général ». Non, n’invitez pas les gens à se sacrifier au bien commun, cette prétention chrétienne ne peut avoir aucun succès. Ils comprendront bien mieux l’exhortation contraire à ne se laisser ravir par personne leur propre bien, mais à le fonder d’une manière durable. Ils seront alors amenés d’eux-mêmes