Page:Stirner - L’Unique et sa propriété.djvu/458

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dirigé sur le périssable, mais uniquement sur l’impérissable, non sur le temporel mais sur ce qui est éternel, absolu, divin, purement humain, etc, sur le spirituel.

On a vu de bonne heure que l’objet auquel on s’attache ou dont on s’occupe n’est pas chose indifférente, on a reconnu l’importance de l’objet. Un objet supérieur aux singularités des choses est l’essence des choses ; l’essence c’est seulement ce qu’on peut concevoir en elles, elle seule est pour l’homme pensant. C’est pourquoi ne dirige pas plus longtemps tes sens sur les choses, mais tes pensées sur l’être des choses. « Bienheureux sont ceux qui ne voient pas et qui cependant croient, c’est-à-dire bienheureux ceux qui pensent, car ils ont affaire à l’invisible et y croient. Pourtant, tel objet de pensée qui des siècles durant causa d’essentielles disputes en arrive enfin à ce point « qu’il ne mérite plus la discussion » ; on voyait cela et pourtant on continuait à maintenir à l’objet une importance en soi, une valeur absolue, comme si pour l’enfant sa poupée, pour le Turc le Coran n’étaient pas la chose importante entre toutes. Tant que je ne suis pas pour moi la chose principale, peu importe l’objet pour lequel je m’agite et c’est seulement le crime plus ou moins grand que je commets contre lui et qui est d’importance. Le degré de mon attachement et de mon dévouement donne la mesure de ma servitude, le degré de mon péché donne la mesure de mon individualité.

Mais finalement il faut savoir secouer tout ce qui nous obsède l’esprit, pour pouvoir nous endormir. Rien ne peut nous occuper dont nous ne nous occupions : l’ambitieux ne peut échapper à ses plans ambitieux, celui qui a la crainte de Dieu ne peut échapper à la