Page:Stirner - L’Unique et sa propriété.djvu/468

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jusqu’à ce que le fouet à esclaves devienne insupportable aux oreilles libres. L’esprit de la corporation a soin par d’autres moyens encore, qu’il ne germe pas de pensée libre, avant tout par une sage éducation. Celui à qui on a convenablement inculqué les principes de la morale, ne deviendra jamais libre de pensées morales et le vol, le parjure, la prévarication, etc., restent pour lui des idées fixes contre lesquelles aucune liberté de pensée ne pourrait le protéger. Il a ses pensées « d’en haut » et s’y tient.

Il en est autrement des concessionnés ou patentés. Chacun doit avoir ses pensées et pouvoir faire de soi ce qu’il veut. S’il a la patente ou la concession d’une faculté de penser, il n’a pas besoin d’un privilège particulier. Mais comme « tous les hommes sont raisonnables », chacun est libre de se mettre en tête les idées qu’il veut et suivant le don naturel qui lui est concédé, d’avoir une fortune de pensées plus ou moins grande. On entend maintenant exhorter à honorer toutes les opinions et convictions. « Autorisez toutes les convictions, soyez tolérant envers les opinions des autres », etc.

Mais « vos pensées ne sont pas mes pensées et vos vues ne sont pas les miennes ». Ou plutôt je veux dire le contraire. Vos pensées sont mes pensées dont je dispose à ma guise et que je renverse impitoyablement ; elles sont ma propriété que j’anéantis comme il me plaît. Je n’attends pas que vous me donniez l’autorisation de les résoudre et de souffler dessus. Il m’est bien égal que vous nommiez aussi ces pensées les vôtres ; elles restent quand même miennes, et mon attitude envers elles est mon affaire, et il n’y a là de ma part aucune usurpation. Il peut me plaire de vous laisser à vos pensées, alors je me tais. Croyez-vous que les