Page:Stirner - L’Unique et sa propriété.djvu/65

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penses une pensée, c’est-à-dire avant que tu l’aies. Ton chant ne te fait-il pas chanteur, ta parole ne te fait-elle pas un homme qui parle ? Ainsi c’est seulement la création des choses de l’esprit qui te fait esprit.

Pourtant de même que Tu Te distingues du penseur, du chanteur, du parleur, tu ne te distingues pas moins de l’esprit et tu sens très bien que tu es encore autre chose qu’esprit ; seulement comme le moi pensant, dans l’enthousiasme de la pensée perd aisément l’ouïe et la vue, l’enthousiasme de l’esprit t’a aussi saisi et tu aspires de toute ta force à devenir et à disparaître en lui. Il est ton idéal, le non atteint, l’au-delà. L’esprit, c’est ton Dieu, « Dieu est esprit ».

Contre tout ce qui n’est pas esprit, tu es plein d’un zèle ardent que tu déploies par conséquent aussi contre toi-même qui ne peux t’affranchir d’un reste de non-spiritualité. Au lieu de dire : « Je suis plus qu’esprit », tu dis avec contrition : « Je suis moins qu’esprit, l’esprit, le pur esprit, qui n’est rien qu’esprit, je puis seulement me l’imaginer, mais je ne le suis pas et comme je ne le suis pas, c’est un autre qui l’est, il existe comme étant autre que moi, je le nomme Dieu ».

La nature même de la chose exige que l’esprit qui doit exister comme pur esprit soit un être d’au-delà, car si je ne suis pas cet esprit, il ne peut exister qu’en dehors de moi ; un homme ne pouvant complètement s’anéantir dans le concept abstrait, le pur esprit, l’esprit en lui-même, ne peut être qu’extérieur à l’homme, au-delà du monde des hommes, non terrestre, mais céleste.

De cette séparation qui existe entre Moi et l’Esprit, de ce fait que Moi et l’Esprit ne sont pas des noms différents pour une seule et même chose, mais des noms