Page:Stirner - L’Unique et sa propriété.djvu/85

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débarrasser de l’engorgement ganglionnaire qui s’en est suivi. Donc en montrant que la religion est loin d’être atteinte dans ses parties essentielles tant qu’on se borne à lui reprocher son existence surhumaine et qu’elle se contente d’en appeler en dernière instance à l’« esprit » (car Dieu est esprit), nous avons suffisamment démontré l’harmonie finale de la morale et de la religion et nous pouvons laisser derrière nous leur lutte opiniâtre. Chez l’une et l’autre il s’agit d’un Être suprême : qu’il soit surhumain ou humain, peu m’importe, dans tous les cas c’est un être au-dessus de moi. Quand finalement on passe de l’Être divin à l’Être humain, à l’Homme, on ne fait que rejeter la peau de serpent des vieilles religions pour en revêtir une autre.

Ainsi Feuerbach nous enseigne que « si seulement on retourne la philosophie spéculative, c’est-à-dire si l’on fait constamment du prédicat le sujet et du sujet l’objet et le principe, on a la vérité sans voiles, la pure et éclatante vérité. » Certes nous perdons ainsi le point de vue étroit de la religion, nous perdons le Dieu qui dans ce cas est sujet, seulement nous acceptons en échange, l’autre côté du point de vue religieux, le côté moral. Nous ne disons plus « Dieu est amour », mais « l’amour est divin ». Si à la place du prédicat « divin » nous mettons « saint », qui a une signification identique, tout est remis en l’état. D’après cela l’amour doit être ce qu’il y a de bon dans l’homme, la divinité, ce qui lui fait honneur, sa véritable humanité (car c’est lui seul « qui le fait homme » qui fait de lui un homme). Plus exactement, l’amour est l’humain de l’homme, l’égoïste qui n’aime pas, est inhumain. Mais justement tout ce que le christianisme et avec lui la philosophie spéculative, c’est-à-dire la théo-