Page:Strauss David - Vie de Jésus, tome 1, Ladrange 1856.djvu/34

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

rale ; elle peut, ce qui n’est qu’une extension de cette grande fonction, pénétrer dans la vie intime de la société ; elle peut enfin, sortant désormais de l’école, fonder une croyance commune, qui soit la conscience commune.

Le second défaut essentiel à toute métaphysique est d’être critique sans pouvoir jamais rien établir d’organique et de social. Débattant les mêmes questions que les théologies et par la même méthode, qui est spontanée dans les théologies, réfléchie dans les métaphysiques, elle discute, ébranle, éclaircit, distingue, mais ne sort jamais du cercle que lui trace son origine. Ici même, pour ne pas m’écarter du cas particulier, la tentative dogmatique que j’ai citée n’est pas d’un autre ordre. Elle se sépare de tout ce qui a été fait en ce genre, par ceci : qu’elle saisit parfaitement la signification historique, grand mérite et grand service que j’ai fait valoir autant que j’ai pu dans le courant de cette Préface. Mais là s’arrête sa puissance ; enchaînée qu’elle est au tronc théologique par sa méthode, elle n’a point d’efficacité qui sorte de l’enceinte de l’école. Son travail va seulement à éclaircir, et non à renouveler ; car, par une contradiction qui lui est inhérente, elle dissout d’une part la conception supérieure, et d’autre part garde tout l’ensemble dont cette conception émane. Elle ébranle donc en même temps qu’elle conserve ; elle conserve en même temps qu’elle ébranle : situation à laquelle on échappe, quand, au lieu de partir de la métaphysique, pour modifier la théologie, on part de la science pour comprendre le monde tel qu’il est pour nous. En niant le miracle, elle est nécessairement nuisible aux traditions théologiques, plus peut-être que les plus téméraires contempteurs du passé et les plus déraisonna-