Page:Strauss David - Vie de Jésus, tome 1, Ladrange 1856.djvu/360

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ce qui a été dit jusqu’à présent, elle se rattache à des récits purement mythiques. Seulement, il ne faut pas s’arrêter à ce point, et dire que peut-être les véritables paroles de Siméon ont été les suivantes : Puissé-je, aussi vrai que je porte ici cet enfant, voir encore le Messie nouveau-né ! paroles auxquelles la légende, après l’événement, donna la tournure que nous voyons aujourd’hui dans Luc[1]. Mais il faut signaler, dans le caractère de cette partie de l’histoire évangélique et dans l’intérêt de la légende chrétienne primitive, la cause pour laquelle de tels récits ont été mis en circulation. Quant au premier point, c’est-à-dire au caractère de cette portion de l’évangile, on ne méconnaîtra pas l’analogie qui existe entre cette scène de la présentation de Jésus dans le Temple et la scène de la circoncision de Jean-Baptiste, racontée par le même évangéliste : deux fois, en effet, grâce à l’inspiration de l’Esprit-Saint, Dieu est remercié de la naissance de ces sauveurs, là par l’organe du père, ici par l’organe d’un autre personnage pieux, et leur vocation future est annoncée prophétiquement. Cette scène a été rattachée une fois à la circoncision, une autre fois à la présentation dans le Temple ; et ce semble un effet du hasard ; mais, du moment que la légende avait ainsi glorifié la présentation de Jésus dans le Temple, sa circoncision, et c’est en effet ce que nous avons vu plus haut, ne devait donner lieu à aucune amplification.

Quant au second point, c’est-à-dire à l’intérêt que la légende avait de créer de pareils récits, il est facile de s’en faire une idée. Celui qui, étant homme, s’est si visiblement manifesté comme le Messie, celui-là, pensa-t-on, a dû, dès son enfance, avoir été reconnaissable comme tel pour un œil éclairé par l’Esprit-Saint ; celui qui, plus tard,

  1. C’est ainsi que s’exprime E. F., dans le mémoire Sur les deux premiers chapitres de Matthieu et de Luc, dans Henke’s Magazin, 5. Bd., S. 169 f. Une semblable demi-mesure se voit dans Matthæi, Synopse der vier Evang., S. 3, 5 f.