Page:Strauss David - Vie de Jésus, tome 1, Ladrange 1856.djvu/38

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mense et l’individu si petit se trouve la vraie et solide récompense de la vie humaine. Se sentir appelé à servir sans autre prix du service que ce prix idéal, n’est-ce pas le sentiment le plus pénétrant et le plus profond que l’on puisse éprouver ? S’il est vrai que le but suprême de la moralité humaine est de se dépouiller de plus en plus, autant que notre nature dans son imperfection le permet, des impulsions égoïstes qui prédominent dans l’enfance de l’homme individuel comme de l’homme collectif, où ce dépouillement atteint-il mieux son terme et avec une pureté plus complète que dans une consécration au service de l’Humanité ?

L’Humanité établit la solidarité entre les générations les plus lointaines. Elle nous fait citoyens de la terre et ne nous permet pas de nous considérer comme des exilés ici-bas qui n’auraient pas de soins plus pressants que de remonter au lieu de leur céleste origine ; elle dirige tous nos efforts vers le perfectionnement de notre condition, nous ayant définitivement appris la valeur relative des améliorations qui se produisent sous son influence protectrice. Au premier rang est l’amélioration morale ; une qualité acquise ou développée importe plus au bonheur commun que les plus riches acquisitions dans un domaine inférieur. Au deuxième rang est l’amélioration physique du corps : plus de santé est un bienfait bien au dessus de plus de richesses. Enfin, au dernier rang, quoique le fondement de tout le reste, est l’accumulation des biens matériels que les générations se transmettent. Tout cela s’opère sous la direction continue de l’intelligence, qui, seule, est auteur de toute puissance, aussi bien sur l’homme intérieur que sur les choses extérieures.

En un monde matériel dont les lois sourdes et