Page:Strauss David - Vie de Jésus, tome 1, Ladrange 1856.djvu/470

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aussi solidement cohérente que le ciel ; mais celui qui examine plus profondément ces choses, ajoute-t-il, songera à ces révélations supérieures par le moyen desquelles des personnes choisies croient, dans la veille, et plus encore en rêve, avoir quelque perception par leurs sens corporels, tandis que c’est seulement leur âme qui est mise en mouvement. » En conséquence, il faudrait concevoir toute la scène lors du baptême, non comme une réalité extérieure, mais comme une vision interne opérée par Dieu ; et cette manière de concevoir a trouvé beaucoup d’approbation parmi les théologiens modernes.

Elle a des appuis dans les deux premiers évangiles et dans le quatrième : ce sont les expressions s’ouvrirent pour lui, ἀνεῴχθησαν αὐτῷ, il vit, εἶδε, je contemplai, τεθέαμαι, qui paraissent pouvoir donner à la scène la tournure d’une vision interne ; et c’est dans le même sens que Théodore de Mopsueste a dit que la descente de l’Esprit-Saint ne fut pas vue de tous les assistants ; mais que, par une certaine contemplation spirituelle, elle ne fut vue que de Jean seul, οὐ πᾶσιν ὤφθη τοῖς παροῦσιν, ἀλλὰ κατά τινα πνευματικὴν θεωρίαν ὤφθη μόνῳ Ἰωάννῃ ; à Jean, il faudrait, d’après Marc, joindre Jésus, qui participa à la vision. Mais il en est tout autrement de Luc : les expressions qu’il emploie, il arriva que s’entr’ouvrirent… et que descenditet qu’une voix, se fit entendre, ἐγένετο ἀνεῳχθῆναι… καὶ καταϐῆναι… καὶ φωνὴν… γενέσθαι, portent un caractère absolument extérieur et objectif, surtout si l’on y ajoute les mots : sous forme corporelle, σωματικῷ εἴδει[1]. Par conséquent, quand on maintient la complète vérité de tous les récits évangéliques, on est obligé d’interpréter d’après le récit de Luc, qui ne laisse aucun doute, les autres récits, qui sont moins précis, et d’y voir une scène qui ne se passa

  1. C’est aussi ce que Lücke reconnaît, Comm. zum Evangel. Joh., 1, S. 370, Bleek, l. c., S. 437.