Page:Strauss David - Vie de Jésus, tome 1, Ladrange 1856.djvu/97

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avec une histoire que l’on sait être véritable, tantôt il porte en soi des traces irrécusables de vraisemblance ; de sorte que le critique peut rejeter, il est vrai, l’enveloppe, mais conserver le fond comme historique. Le plus difficile à distinguer est ce qui a été appelé mythe poétique, et Bauer ne sait donner qu’un caractère négatif : c’est que, si l’événement raconté est assez merveilleux pour être impossible, et si en même temps on n’y reconnaît aucune intention de symboliser une idée déterminée, il faut conjecturer que tout le récit est dû à l’imagination d’un poëte. Quant à la généralité des mythes, Schelling, dans son Mémoire, appelle l’attention sur cette particularité, à savoir, que la naissance en est dénuée de tout artifice et de tout calcul. Dans les mythes historiques, dit-il, ce qu’ils renferment de non historique n’est pas le produit artificiel de fictions préméditées, mais s’y est glissé de soi-même par le cours du temps et de la tradition ; et les mythes philosophiques n’ont pas été inventés seulement pour un peuple accessible uniquement aux idées sensibles, mais les anciens sages ont, pour eux-mêmes, cherché une enveloppe historique à leurs conceptions, afin d’éclairer, dans l’absence d’idées et d’expressions abstraites, l’obscurité de leurs expressions par une représentation figurative.

Des remarques précédentes il découle que l’explication naturelle de l’histoire de l’Ancien Testament surtout ne pouvait se soutenir qu’autant que ces documents passaient pour contemporains ou très voisins des événements eux-mêmes : aussi les hommes qui ont renversé cette dernière opinion, Vater et De Wette, sont en même temps ceux qui ont fondé solidement l’explication mythique de l’histoire de la Bible. D’après la remarque du premier[1], le caractère propre des récits du Pentateuque ne se peut compren-

  1. Voyez le Mémoire sur Moïse et les rédacteurs du Pentateuque, dans le troisième vol. du Comm. über den Pent., S. 660.