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Page:Stuart Merrill - Prose et vers (1925).pdf/76

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moi. Nous étions au centre de la grande cité. Celle-là courait à ses emplettes. Celui-ci à ses affaires. Mais c’étaient des ombres. Il n’existait ce jour là, que tes lèvres, et tes yeux et tes mains.

12

Quand nos corps furent unis dans le spasme suprême et que nous eûmes accompli l’acte d’amour qui nous fait les égaux des dieux, il me sembla que mon âme tombait de la plus lointaine des étoiles.

Et quand je sortis, après le dernier et le meilleur baiser, dans la ville fourmillante de lumières et sonore de voix, de pas et de roues, je me demandai, étourdi encore de la chute de mon âme : Quel est donc le nom de l’astre où je suis ?

13

Les belles dames m’ont dit : « Mais, Monsieur le poète, vous êtes fou d’aimer cette femme ! Elle n’a ni grâce ni élégance et ses toilettes viennent du mauvais faiseur. Où va-t-elle acheter ses corsets ? Et vit-on jamais d’aussi déplorables chapeaux ? »

Je ferme les yeux et je souris, car je connais la secrète splendeur de ta beauté, et je revois soudain ton corps à la peau dorée, et je sens autour de moi l’étreinte de tes bras ronds, et je respire