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Départ — Égarement


Toulon, le 6 novembre.


Je le laisse, où le temps de ma vie s’est arrêté. Je n’irai pas au delà. Et le temps passe pourtant, le temps qui pour le cœur compte si peu, qu’il ne compte pas.

Le temps passe : pas une seconde, pas un souffle de retard. Trois jours déjà, — ou trois ans, ou trois siècles ? — Une seule douleur, un seul mal, un espace infini où, tant que je serai, je dois être sans lui. Une route sans issue, puisqu’elle n’a point de jour sur le désir ni sur l’espérance.

Dans la ville voluptueuse et forte, qui rit sous la lune, je l’ai quitté ce soir, pour