Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 1-2.djvu/19

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des pas, petite et légère, annonce le passage d’une femme…

Elle s’est dirigée vers les roches d’où l’on aperçoit au delà du détroit les steppes neigeuses de la Sibérie.

Du côté de la Sibérie, l’empreinte plus grande, plus profonde, annonce le passage d’un homme.

Il s’est aussi dirigé vers le détroit.

On dirait que cet homme et que cette femme, arrivant ainsi en sens contraire aux extrémités du globe, ont espéré s’entrevoir à travers l’étroit bras de mer qui sépare les deux mondes !

Chose plus étrange encore ! cet homme et cette femme ont traversé ces solitudes pendant une horrible tempête…

Quelques noirs mélèzes centenaires, pointant naguère çà et là dans ces déserts, comme des croix dans un champ de repos, ont été arrachés, brisés, emportés au loin par la tourmente…

À cet ouragan furieux, qui déracine les grands arbres, qui ébranle les montagnes de glace, qui les heurte masse contre masse, avec le fracas de la foudre… à cet ouragan furieux ces deux voyageurs ont fait face.

Ils lui ont fait face sans dévier un moment de la ligne invariable qu’ils suivaient… on le devine à la trace de leur marche égale, droite et ferme.