Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 1-2.djvu/230

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Dagobert avait tenu jusqu’alors ses bras croisés. Tout à coup il les tendit violemment en serrant les poings… Ce brusque mouvement fut si expressif, que les deux sœurs jetèrent un cri d’effroi en se rapprochant de lui.

— Tenez, M. le bourgmestre, dit le soldat, les dents serrées par la colère, que cet homme s’en aille… ou je ne réponds plus de moi…

— Comment ! dit le bourgmestre avec hauteur, des ordres à moi… vous osez… ?

— Je vous dis de faire descendre cet homme, reprit Dagobert hors de lui, ou il arrivera quelque malheur !

— Dagobert… mon Dieu… calme-toi ! s’écrièrent les enfants en lui prenant les mains.

— Il vous sied bien, misérable vagabond, pour ne pas dire plus, de commander ici, reprit enfin le bourgmestre furieux. Ah ! vous croyez que pour m’abuser il suffit de dire que vous avez perdu vos papiers ! Vous avez beau traîner avec vous ces deux jeunes filles qui, malgré leur air innocent… pourraient bien n’être que…

— Malheureux ! s’écria Dagobert en interrompant le bourgmestre d’un regard si terrible, que le juge n’osa pas achever.

Le soldat prit les enfants par le bras, et, sans qu’elles eussent pu dire un mot, il les fit, en