Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 1-2.djvu/239

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s’écria Dagobert le cœur brisé, en voyant disparaître la pâle et douce figure de la jeune fille au milieu des ténèbres de cette nuit profonde, que de violentes rafales de vent et des torrents de pluie rendaient plus sinistre encore.

— Dagobert, nous t’attendons ; viens vite…, dirent à voix basse les orphelines, réunies au pied de la fenêtre.

Grâce à sa grande taille, le soldat sauta, plutôt qu’il se laissa glisser à terre.

Dagobert et les deux jeunes filles avaient, depuis un quart d’heure à peine, quitté en fugitifs l’auberge du Faucon blanc, lorsqu’un violent craquement retentit dans la maison.

La porte avait cédé aux efforts du bourgmestre et de Morok, qui s’étaient servis d’une lourde table pour bélier.

Guidés par la lumière, ils accoururent dans la chambre des orphelines, alors déserte.

Morok vit les draps flotter au dehors, et s’écria :

— M. le bourgmestre… c’est par la fenêtre qu’ils se sont sauvés ; ils sont à pied… par cette nuit orageuse et noire, ils ne peuvent être loin.

— Sans doute… nous les rattraperons… Misérables vagabonds !… Oh !… je me vengerai… Vite, Morok… il y va de ton honneur et du mien…