Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 1-2.djvu/76

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

— Mais on fait connaissance… en buvant un verre de vin du Rhin, nous parlerons de nos campagnes… car j’ai aussi vu la guerre, moi… je vous en avertis : cela vous rendra peut-être plus poli…

Les veines du front chauve de Dagobert se gonflaient fortement ; il trouvait dans le regard et dans l’accent de son interlocuteur obstiné quelque chose de sournoisement provocant ; pourtant il se contint.

— Je vous demande pourquoi vous ne voudriez pas boire un verre de vin avec moi ;… nous causerions de la France… J’y suis longtemps resté ; c’est un beau pays. Aussi, quand je rencontre des Français quelque part, je suis flatté… surtout lorsqu’ils manient le savon aussi bien que vous ; si j’avais une ménagère… je l’enverrais à votre école.

Le sarcasme ne se dissimulait plus ; l’audace et la bravade se lisaient dans l’insolent regard du Prophète. Pensant qu’avec un pareil adversaire, la querelle pouvait devenir sérieuse, Dagobert, voulant à tout prix l’éviter, emporta son baquet dans ses bras et alla s’établir à l’autre bout du porche, espérant ainsi mettre un terme à une scène qui éprouvait sa patience.

Un éclair de joie brilla dans les yeux fauves