Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 5-6.djvu/171

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l’attention sur nous par des moyens d’une sauvagerie et d’un retentissement déplorables… Pour plus de mystère, c’est la garde, c’est le commissaire de police, ce sont des geôliers que vous prenez pour complices… Mais cela fait pitié, monsieur… Un succès éclatant pouvait seul faire pardonner ces pauvretés ! et ce succès vous ne l’avez pas eu…

— Monsieur, dit le père d’Aigrigny vivement blessé, car madame de Saint-Dizier, ne pouvant cacher l’espèce d’admiration que lui causait la parole nette et cassante de Rodin, regardait son ancien amant d’un air qui semblait dire : « Il a raison ; » monsieur, vous êtes plus que sévère… dans votre jugement… et malgré la déférence que je vous dois, je vous dirai que je ne suis pas habitué…

— Il y a bien d’autres choses, ma foi ! auxquelles vous n’êtes pas habitué, dit rudement Rodin en interrompant le révérend père ; mais vous vous y habituerez… Vous vous êtes fait jusqu’ici une fausse idée de votre valeur ; il y a en vous un vieux levain de batailleur et de mondain qui toujours fermente, et ôte à votre raison le froid, la lucidité, la pénétration qu’elle doit avoir ;… vous avez été un beau militaire, fringant et musqué ; vous avez couru les guerres, les fêtes, les plaisirs, les femmes…