Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 5-6.djvu/320

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crois enfin fermement que quelque jour vous aurez à demander conseil au pauvre vieux philosophe ; à cause de tout cela, je dois, je veux conserver envers vous la plus complète indépendance…

— Mais, monsieur, c’est au contraire moi qui serais votre obligée, si vous vouliez accepter ce que je désirerais tant vous offrir.

— Oh ! ma chère demoiselle, dit Rodin en souriant, je sais que votre générosité saura toujours rendre la reconnaissance légère et douce ; mais, encore une fois je ne puis rien accepter de vous… Un jour peut-être… vous saurez pourquoi.

— Un jour ?

— Il m’est impossible de vous en dire davantage. Et puis supposez que je vous aie quelque obligation, comment vous dire alors tout ce qu’il y a en vous de bon et de beau ? Plus tard, si vous me devez beaucoup pour mes conseils, tant mieux, je n’en serai que plus à l’aise pour vous blâmer si je vous trouve à blâmer.

— Mais alors, monsieur, la reconnaissance envers vous m’est donc interdite ?

— Non… non…, dit Rodin avec une apparente émotion. Oh ! croyez-moi, il viendra un moment solennel où vous pourrez vous acquitter d’une manière digne de vous et de moi.