Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 5-6.djvu/460

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— Hélas ! mon cher prince, regardez-moi donc ;… dites-moi si ce serait là mon rôle… Non, non, je vis seul et retiré. Et puis, ajouta Rodin après un silence, en attachant sur le jeune prince un regard pénétrant, attentif et curieux, comme s’il eût voulu le soumettre à une sorte d’expérimentation par les paroles suivantes, et puis, voyez-vous, M. de Montbron sera mieux à même que moi, dans le monde où il va… de vous éclairer sur les piéges que l’on pourrait vous tendre. Car vous avez aussi des ennemis… vous le savez, de lâches ennemis, qui ont abusé d’une manière infâme de votre confiance, qui se sont raillés de vous. Et comme malheureusement leur puissance égale leur méchanceté, il serait peut-être prudent à vous de tâcher de les éviter… de les fuir… au lieu de leur résister en face.

Au souvenir de ses ennemis, à la pensée de les fuir, Djalma frissonna de tout son corps, ses traits devinrent tout à coup d’une pâleur livide ; ses yeux, démesurément ouverts, et dont la prunelle se cercla ainsi de blanc, étincelèrent d’un feu sombre ; jamais le mépris, la haine, la soif de la vengeance n’éclatèrent plus terribles sur une face humaine… Sa lèvre supérieure, d’un rouge de sang, laissant voir ses petites