Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 5-6.djvu/53

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— Malgré ma résolution, mon père, de quitter la compagnie, la découverte que j’avais faite me fut bien douloureuse… Ah ! croyez-moi, pour une âme juste et bonne, rien n’est plus affreux que d’avoir à renoncer à ce qu’elle a respecté et à le renier… Je souffrais tellement… qu’en songeant aux dangers de ma mission, j’espérais avec une joie secrète que Dieu me rappellerait peut-être à lui dans cette circonstance ;… mais au contraire, il a veillé sur moi avec une sollicitude providentielle.

Et ce disant, Gabriel tressaillit au souvenir de la femme mystérieuse qui lui avait sauvé la vie en Amérique. Puis, après un moment de silence, il reprit :

— Ma mission terminée, je suis revenu ici, mon père, décidé à vous prier de me rendre la liberté et de me délier de mes serments… Plusieurs fois, mais en vain, je vous demandai un entretien… Hier la Providence voulut que j’eusse une longue conversation avec ma mère adoptive ; par elle j’ai appris la ruse dont on s’était servi pour forcer ma vocation, l’abus sacrilège que l’on a fait de la confession pour l’engager à confier à d’autres personnes les orphelines qu’une mère mourante avait remises aux mains d’un loyal soldat. Vous le comprenez,