Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 5-6.djvu/553

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intimider par la violence. À ces turbulents meneurs, déjà aigris par l’infortune, on exagéra encore le bonheur des ouvriers de M. Hardy, et l’on parvint ainsi à exciter en eux une jalousie haineuse. On alla plus loin : les prédications incendiaires d’un abbé, membre de la congrégation, venu exprès de Paris pour prêcher pendant le carême contre M. Hardy, agirent puissamment sur les femmes de ces ouvriers, qui, pendant que leurs maris hantaient le cabaret, se pressaient au sermon. Profitant de la peur croissante que l’approche du choléra inspirait alors, on frappa de terreur ces imaginations faibles et crédules en leur montrant la fabrique de M. Hardy comme un foyer de corruption, de damnation, capable d’attirer la vengeance du ciel et par conséquent le fléau vengeur, sur le canton. Les hommes, déjà profondément irrités par l’envie, furent encore incessamment excités par leurs femmes qui, exaltées par le prêche de l’abbé, maudissaient ce ramassis d’athées qui pouvaient attirer tant de malheurs sur le pays.

Quelques mauvais sujets appartenant aux ateliers du baron Tripeaud, et soudoyés par lui (nous avons dit quel intérêt cet honorable industriel avait à la ruine de M. Hardy) vinrent augmenter l’irritation générale et combler la