Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 13.djvu/106

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des implacables ressentiments laissés dans votre âme par le passé… je vous ai dit qu’au lieu de gagner votre pain par votre travail…

— … Je pouvais servir utilement, activement la plus sainte des causes… celle de l’humanité…

— Oui, je vous ai dit cela…

— Vous avez ajouté que, pour arriver à ce résultat… je devais subir une initiation de quelques mois pendant lesquels je ne pourrais demander aucune ressource à mon travail… J’ai accepté de vous sans rougir de quoi subvenir à mes modestes besoins… Vous étiez pour moi un frère et un éducateur… Je vous voyais chaque jour… durant de longues heures… peu à peu mes yeux se sont ouverts à la lumière… de radieux horizons ont ébloui ma vue… Vous m’avez fait partager vos généreuses aspirations… vous m’avez enfin donné la foi… vous m’avez inspiré cette fièvre de dévouement, de résignation, cette soif de sacrifices… qui fait les séides et les martyrs… Vous suiviez avec un intérêt passionné mes progrès dans la voie nouvelle que vous m’ouvriez… me faisant de jour en jour espérer… que mon initiation terminée… je pourrais revendiquer ma part d’action dans vos projets… Enfin, hier…

— Hier… Victoria… je vous ai dit : — « Demain sera le jour si impatiemment attendu par vous… demain vous serez affiliée à la secte dont je suis l’un des membres… » — je tiendrai ma promesse dans quelques instants…

— Et voilà, Frantz, ce qui me semble impossible ou du moins inexplicable depuis que vous m’avez révélé votre naissance… votre rang.

— Quoi donc d’impossible ou d’inexplicable à cela ?

— Vous me le demandez… vous de race souveraine… vous… appelé à régner un jour ?…

— Qu’importe…

— Mais le but suprême de cette secte… n’est donc pas tel… que vous me l’avez montré ? — s’écrie Victoria avec une expression d’incrédulité poignante, — vous m’avez donc trompée ?