Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 13.djvu/138

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par le succès de l’expédition de l’Abbaye ; il attaque la prison de la Force et délivre les détenus pour dettes. (Entre nous, ces canailles croyaient évidemment faire leur cour à M. de Mirabeau…) Mais, par une contradiction inexplicable, après avoir accompli ces exploits, ces gredins apprennent que les voleurs et les assassins détenus au Châtelet, instruits de la libération de leurs dignes amis, les soldats indisciplinés et les prisonniers pour dettes, et pensant que leur tour aussi est venu d’être libérés, se révoltaient contre leurs gardiens…

— Eh bien ! cette canaille a pareillement forcé le Châtelet, et lâché dans Paris cette horde de bandits de toute sorte ?…

— Non, mon révérend, non ; cette canaille, vous disais-je, a, par une contradiction singulière, prêté main-forte aux gardiens et au poste du Châtelet, à seule fin de réprimer la révolte, et ladite canaille a assommé les plus enragés de ces brigands…

— Allez-vous, comte, attribuer à un vague sentiment d’équité la différence que cette populace semblait établir entre les prisonniers pour dettes ou les soldats insubordonnés et des brigands souillés de tous les crimes ?

— Non, parbleu… mais, cependant… je me demande la cause de cette contradiction.

— Rien de plus simple : cette vile plèbe, songeant au jour du pillage, qu’elle croit prochain, craignait d’avoir à partager le butin avec les scélérats détenus au Châtelet… et les laissait prudemment sous clef…

— Vous parlez d’or, mon révérend, les gens de votre ordre savent leur humanité sur le bout du doigt ! Quoi qu’il en soit, l’insurrection prenant un caractère de plus en plus grave, mon ami le prince de Lambesc reçoit enfin du maréchal de Broglie, le nouveau ministre de la guerre, l’ordre de monter à cheval avec son régiment le Royal-Allemand, et de charger ce mauvais peuple, alors ameuté en foule dans le jardin des Tuileries ; l’on m’ordonne en même temps de