Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 15.djvu/108

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— je dois faire connaître à votre mère et à vous l’intention où je suis de continuer mon métier de serrurier : mon patron, maître Gervais, m’a, depuis longtemps, proposé de me céder son établissement, dont je lui rembourserai annuellement le prix ; je ne suis plus d’âge à entreprendre une autre carrière que celle à l’aide de laquelle j’ai vécu jusqu’ici, et…

— Mais, monsieur Lebrenn, — reprit madame Desmarais, — vous oubliez que…

— Mère, on ne dit pas monsieur à son fils, — objecte Charlotte, interrompant en souriant madame Desmarais, — on dit : mon cher Jean !

— Tu as raison, mon enfant, et si M. Lebrenn le permet…

— Ah ! madame…

— Allons, vous aussi ? — reprend Charlotte, s’adressant à Jean. — Est-ce qu’on dit à sa mère : Madame ?

— C’est vrai, Charlotte, et il me sera aussi doux de donner le nom de mère à madame Desmarais… que de recevoir d’elle le nom de fils.

— Eh bien, mon cher Jean, — ajoute madame Desmarais, — puisque vous me faites connaître votre intention de continuer votre métier de serrurier, je vous répondrai que ma fille a une dot…

— C’est à quoi, je vous l’avoue, je n’ai jamais songé, — répond Jean Lebrenn ; — la dot de Charlotte lui appartient, elle en usera comme bon lui semblera. Quant à moi… et je suis certain que ni vous ni elle ne me désapprouverez… quant à moi, je suis résolu de vivre de mon travail, ainsi que j’en ai vécu jusqu’ici. L’établissement, parfaitement achalandé, que me cédera maître Gervais, au prix de trente mille livres, rapporte, bon an mal an, de neuf à dix mille livres de bénéfice ; ce revenu nous permettra donc de vivre dans une certaine aisance, et de m’acquitter en peu d’années envers mon patron.

— Mais, encore une fois, mon cher Jean, la dot de ma fille se