Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 15.djvu/15

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LE COMTE DE PLOUERNEL. — Le marquis est brave comme son épée ; il s’est battu en lion à la bataille de l’Argonne.

M. HUBERT. — Eh ! morbleu, messieurs ! le courage ne suffit pas : il faut du bon sens pour mener à bien une entreprise comme la nôtre.

LE MARQUIS. — Pardon, cher monsieur, hi ! hi ! ou plutôt chère madame. Ah ! ah ! ah ! si vous saviez quelle figure pharamineuse… vous… hi ! hi ! pardon, c’est plus fort que moi… voilà que ça me reprend… ah ! ah ! ah !… Oh ! la rate !

Le marquis recommence de rire aux éclats en se tordant sur sa chaise. M. Hubert, d’un caractère très-violent, s’exaspère de nouveau ; mais de nouveau, s’étant apaisé, grâce aux instances du comte, de son frère, il leur apprend la cause de son déguisement, et comme il doit son salut au dévouement de sa sœur ; durant ces confidences, le fou rire du marquis s’est enfin calmé.

LE COMTE DE PLOUERNEL. — Puisque cette partie de la rue Saint-Honoré où vous avez failli être arrêté, cher monsieur Hubert, se trouvait ainsi surveillée ce soir par la police, j’aurais pu, en sortant de chez moi, tomber entre les mains de ces drôles, car le refuge où je me cache depuis mon retour à Paris est situé près de la porte Saint-Honoré. La femme d’un ancien piqueur de la vénerie du roi me donne asile ; et de la lucarne de la mansarde que j’habite, j’aperçois la maison de ce misérable Desmarais, votre beau-frère, que je regrette maintenant de n’avoir pas fait autrefois mourir sous le bâton, lorsque je l’ai fait châtier par mes laquais !

LE JÉSUITE MORLET. — Quoi ! comte, vous demeurez près la porte Saint-Honoré ! Quel numéro, je vous prie ?

LE COMTE DE PLOUERNEL. — Numéro 19, je crois.

LE JÉSUITE MORLET. — Vous ne pouviez plus mal choisir votre refuge.

LE COMTE DE PLOUERNEL. — Pourquoi cela ?

LE JÉSUITE MORLET. — Vous souvenez-vous de cette belle marquise Aldini ?