Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 15.djvu/166

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privée les qualités que vous avez perdues, vous redeviendrez ce que vous étiez, ce que vous êtes encore, je ne veux pas en douter : tendre père, bon époux, et alors… j’en prends l’engagement au nom de ma femme et au mien… nous serons les premiers à vous offrir de venir partager notre modeste existence… Sinon, je vous le déclare… nous vivrons loin de vous, et nous mettrons madame Desmarais à l’abri des cruels chagrins qu’elle endure depuis quelque temps.

L’avocat Desmarais, après avoir écouté pensif et sombre les sages paroles de son gendre, parut soudain frappé d’une idée subite, et reprit avec un mélange d’indignation, de fureur et d’effroi… car cet homme était sincère dans ses abominables soupçons :

— Je devine tout maintenant… Quel tissu de perfidies et de noirceurs !… Ah ! vos projets me sont dévoilés… Double traître ! fille dénaturée… femme scélérate !!

— Outrager ainsi ma mère, mon mari et moi ! — s’écria douloureusement Charlotte. — Mon Dieu !… qu’avons-nous donc fait pour mériter de pareils reproches ?…

— Un dernier mot, citoyen Desmarais, car cette pénible discussion a trop duré pour nous tous, — ajoute Jean Lebrenn ; — consentez à donner votre démission de représentant du peuple, en prétextant de l’affaiblissement de votre santé… rentrez dans la vie privée… À cette condition, Charlotte, sa mère et moi, nous ne nous séparerons pas de vous, et grâce à mes relations personnelles… je me porte garant que votre tranquillité ne sera pas troublée !

— Mon père… nous vous en conjurons… écoutez les conseils de Jean… fiez-vous à sa promesse.

— Oui, oui, et nous redeviendrons tous heureux comme nous l’étions jadis… Ah ! combien de fois j’ai maudit le jour où vous avez été nommé député à la première assemblée ! — ajouta madame Desmarais d’une voix suppliante. — Mon ami, renoncez à la vie publique… revenez à nous… j’oublierai les chagrins que vous m’avez