Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 15.djvu/181

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votre attention : j’y insiste, parce que si nous avons la conscience de ces périls, nous n’en concerterons que mieux nos efforts.

M.HUBERT. — Quels sont ces deux points si importants ?

LE JÉSUITE MORLET. — L’un touche au présent, l’autre à l’avenir ; le premier peut sauver leur infernale république : c’est un mode de stratégie nouvelle ; le second peut affermir ladite infernale république d’une manière presque indestructible : c’est l’éducation nationale… Ah ! lorsque je vous disais tout à l’heure que j’avais en poche des renseignements bien autrement considérables qu’un projet de Constitution, je disais vrai… Jugez-en d’abord par ces dix lignes, pas davantage… terminant un mémoire remis au comité de défense générale… Il y a dans ces dix lignes toute une transformation de l’ancien système de guerre, écoutez. — « En résumé, le moyen le plus sûr, le plus simple de suppléer autant que possible à l’art par le nombre est de faire une guerre de masses, c’est-à-dire de diriger toujours sur les points d’attaque le plus de troupes et d’artillerie que l’on pourra, d’exiger que les généraux soient constamment à la tête des soldats pour leur donner l’exemple du dévouement et du courage, d’habituer chefs et soldats à ne jamais calculer le nombre des ennemis, mais à les aborder brusquement à la baïonnette sans songer à tirailler ni à faire des manœuvres, auxquelles les troupes françaises actuelles ne sont ni exercées ni préparées. Cette manière de combattre, si en rapport avec l’adresse, l’impétuosité et le caractère naturel de la nation, ne peut que lui donner la victoire en déroutant les armées étrangères. »

D’où il suit, — reprend le jésuite Morlet, — que moyennant ce nouveau système de guerre, si merveilleusement approprié à la furia française (souvenez-vous de la charge des volontaires à la bataille de Valmy), la Convention lèvera en masse huit à neuf cent mille gredins, les lancera en vrais chiens enragés sur les armées étrangères, et il est à craindre que celles-ci, malgré leur bravoure, ne lâchent pied, complètement déroutées par la forcennerie d’une attaque sauvage