Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 15.djvu/343

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— Comment cela, capitaine ?

— Le père de notre général était un valet, c’est vrai ; seulement ce valet servait, non point Capet, mais ses chiens ; en d’autres termes, le père de Hoche était valet de chiens de la vénerie de Louis XVI.

— Quel règne ! — reprend Castillon allumant sa pipe. — Les ci-devant toutous… des ci-devant monarques avaient des domestiques !! .. Ainsi, sans la république, notre général risquait d’être à perpétuité serviteur du seigneur Ramoneau ou du seigneur Mascareau.

— Lazare Hoche, — ajoute le capitaine Martin, — servait à quatorze ans comme palefrenier de la vénerie de Capet.

— Diable ! — dit Castillon, — un valet de cheval est fièrement au-dessus d’un valet de chien… C’était déjà un avancement !

— Heureusement Hoche ne s’est pas contenté de cet avancement-là, camarade Castillon, — reprend le capitaine ; — il était donc palefrenier ; lorsque, à l’âge de quatorze ans, ayant perdu son père, il fut recueilli par sa tante, fruitière à Versailles. Cette brave femme prit grand soin de l’orphelin, qu’elle aimait à l’idolâtrie ; lui fit apprendre à lire, à écrire ; chaque dimanche, elle donnait à son neveu quelque argent ; mais Hoche, au lieu de dépenser cet argent à ses plaisirs, achetait des livres, surtout ceux qui traitaient de l’art de la guerre… lecture qu’il aimait passionnément.

— Tiens !… c’est drôle ! — reprit Castillon, — c’est absolument comme Olivier.

— Qu’est-ce que Olivier, camarade ?

— Un apprenti de notre atelier, mon capitaine… Et ce garçon serait peut-être aussi devenu général, car Olivier avait une véritable vocation pour l’état militaire ; mais nous ne savons ce qu’il est devenu. — Et Castillon ajoute mentalement : — Nous sommes dans la même ignorance au sujet de la citoyenne Victoria.

— Poussé par son goût invincible pour la profession des armes, Hoche, à dix-huit ans, s’engage dans les gardes françaises, — continue le capitaine Martin ; — il se montrait d’une régularité exemplaire