Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 3.djvu/113

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– Victoria pourra se faire accompagner d’une petite escorte.

– Qui serait massacrée par tes gens !… L’embûche est trop grossière.

– Tu veux donc mourir ! — s’écria la prêtresse en grinçant les dents de rage et me menaçant de son couteau ; — on va rallumer le foyer de la chaudière… Je te ferai plonger vivant dans l’eau magique, et tu y bouilliras jusqu’à la mort… Une dernière fois, choisis… Ou tu vas mourir dans les supplices, ou tu vas écrire à Victoria de se rendre au camp parée de ses plus riches ornements… Choisis !… — ajouta-t-elle dans un redoublement de rage, en me menaçant encore de son couteau ; — choisis… ou tu vas mourir.

Je savais qu’il n’était pas de race plus pillarde, plus cupide, plus vaniteuse, que cette maudite race franque… Je remarquai que les grands yeux gris d’Elwig étincelaient de convoitise chaque fois qu’elle me parlait des magnifiques parures que, selon elle, devait posséder la mère des camps. L’accoutrement ridicule de la prêtresse, la profusion d’ornements sans valeur dont elle se couvrait avec une coquetterie sauvage, pour plaire sans doute à Riowag, le chef des guerriers noirs ; et surtout la persistance qu’elle mettait à me demander que Victoria se rendit au camp couverte de riches ornements, tout me donnait à penser qu’Elwig voulait attirer ma sœur de lait dans un piège pour l’égorger et lui voler ses bijoux. Cette embûche grossière ne faisait pas honneur à l’invention de l’infernale prêtresse ; mais sa vaniteuse cupidité pouvait me servir ; je lui répondis d’un air indifférent :

– Femme, tu veux me tuer si je n’engage pas Victoria à venir ici ? Tue-moi donc… fais bouillir ma chair et mes os… tu y perdras plus que tu ne sais, puisque tu es la sœur de Néroweg, l’aigle terrible, un des plus grands rois de vos hordes !…

– Que perdrai-je ?

– De magnifiques parures gauloises !

– Des parures… Quelles parures ? — s’écria Elwig d’un air de