Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 3.djvu/21

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et de prières, ils n’auraient plus de belles maîtresses, ils ne nous chargeraient plus de ces amoureux courtages, récompensés si magnifiquement en cas de succès !

— Oui, oui, — criaient-ils tous ensemble, — à mort ce Nazaréen, qui veut faire de nous, qui vivons dans la paresse, l’abondance et la joyeuseté, des mendiants ou des animaux de travail !

Geneviève entendit encore d’autres propos, tenus à demi-voix, et menaçants pour la vie de l’ami des affligés ; l’un des deux mystérieux émissaires derrière lequel elle se trouvait, dit à son compagnon :

— Maintenant notre témoignage suffira pour faire condamner ce maudit ; je me suis entendu avec le seigneur Caïphe.

À ce moment, l’un des huissiers du prince des prêtres placé à côté du jeune maître de Nazareth et chargé de veiller sur lui, frappa de sa masse sur les dalles de la salle ; un grand silence se fit.

Caïphe, après quelques paroles échangées à voix basse avec les autres pharisiens composant le tribunal, dit à l’assistance :

— Quels sont ceux qui peuvent déposer ici contre le nommé Jésus de Nazareth ?

L’un des deux émissaires s’avança au pied du tribunal, et dit d’une voix solennelle :

— Je jure avoir entendu cet homme affirmer que les princes des prêtres et les docteurs de la loi étaient tous des hypocrites, et les traiter de : race de serpents et de vipères.

Un murmure d’indignation s’éleva parmi les miliciens et les serviteurs du grand-prêtre ; les juges s’entre-regardèrent, ayant l’air de se demander si d’aussi horribles paroles avaient pu être prononcées.

L’autre émissaire s’avançant auprès de son complice, ajouta d’une voix non moins solennelle :

— Je jure avoir entendu cet homme-ci affirmer qu’il fallait se révolter contre le prince Hérode et contre l’empereur Tibère, auguste protecteur de la Judée, afin de le proclamer, lui, Jésus de Nazareth, roi des Juifs.