Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 3.djvu/300

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attendre en Bretagne, berceau de ta famille, le jour de notre rencontre ailleurs qu’ici.

» La conquête romaine avait dépouillé ta race de ses champs paternels. La Gaule, redevenue libre, a dû légitimement revendiquer, au nom du droit ou par la force, l’héritage de ses enfants sur les descendants des Romains. Je ne sais quel sera l’état de notre pays lorsque nous serons séparés ; quoi qu’il arrive, tu pourras revendiquer ton légitime héritage par trois moyens : le droit, l’argent ou la force… Tu as le droit, tu as la force, tu as l’argent… car tu trouveras dans ce coffret une somme suffisante pour racheter, au besoin, les champs de ta famille, et vivre désormais heureux et libre près des pierres sacrées de Karnak, témoins de la mort héroïque de ton aïeule Hêna, la vierge de l’île de Sên.

» Tu m’as souvent montré les pieuses reliques de ta famille… je veux y ajouter un souvenir… Tu trouveras dans ce coffret une alouette en bronze doré : je portais cet ornement à mon casque le jour de la bataille de Riffenël, où j’ai vu mon fils Victorin faire ses premières armes… Garde, et que ta race conserve aussi ce souvenir de fraternelle amitié ; il t’est laissé par ta sœur de lait Victoria ; elle est de ta famille… n’a-t-elle pas bu le lait de ta vaillante mère ?…

» À l’heure où tu liras ceci, mon bon frère Scanvoch, je revivrai ailleurs, auprès de ceux-là que j’ai aimés…

» Continue d’être fidèle à la Gaule et à la foi de nos pères… Tu t’es montré digne de ta race ; puissent ceux de ta descendance être dignes de toi, et écrire sans rougir l’histoire de leur vie, ainsi que l’a voulu ton aïeul Joel, le brenn de la tribu de Karnak

 » Victoria. » ………………………….

Ai-je besoin de te dire, mon enfant, combien je fus touché de tant de sollicitude ?… J’étais alors plongé dans un morne désespoir et absorbé par la crainte des graves événements qui pouvaient suivre la mort de Victoria. Je restai presque insensible à l’espoir de retourner