Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 6.djvu/131

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le-Chappet d’un air contrit, — tel est aujourd’hui plein de vie et de jeunesse, qui sera demain cadavre et poussière !

— Donc, si d’aventure le roi mon mari mourait... — reprit Blanche en ne quittant pas des yeux les yeux du comte de Paris, — enfin, si un jour ou l’autre je devenais veuve... mon amour ne serait plus adultère, n’est-ce pas, Hugh ?

— Non, puisque tu serais libre.

— Et toi, serais-tu fidèle à tes paroles de tout à l’heure lorsque tu me disais : « Blanche, j’en jure Dieu par le salut de mon âme ! si tu devenais veuve je me séparerais de ma femme Adelaïde de Poitiers, et je t’épouserais avec une joie pure et sainte ? »

— Blanche, je te le répète, — reprit Hugh-le-Chappet, en évitant le regard de la reine obstinément fixé sur lui, — j’en jure Dieu par le salut de mon âme ! si tu devenais veuve, j’obtiendrais du pape de divorcer avec Adelaïde de Poitiers, et je t’épouserais.

Un nouveau silence suivit cette réponse du Comte de Paris ; Blanche reprit lentement : — Hugh, il est des morts étranges et subites, n’est-ce pas ?

— En effet, l’on a souvent vu des morts étranges et subites.

— Personne n’est à l’abri de ces hasards du destin ?

— La volonté du ciel dispose seule de nos destinées.

— Mon mari, Ludwig-le-Fainéant, est soumis, comme tout autre, en ce qui touche le terme de sa vie aux décrets de la Providence, n’est-ce pas, Hugh ?

— Assurément.

— Il peut donc, quoiqu’il ait à peine vingt ans, mourir subitement... dans un an, dans six mois, aujourd’hui... demain... que sais-je ?

— La fin de l’homme est la mort.

— Si ce malheur arrivait, — reprit la reine après un nouveau silence, — une chose m’inquiète, Hugh.

— Laquelle ?