Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 6.djvu/159

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Avant de commencer ce récit, je dirai deux mots des rois de la race de Hugh-le-Chappet qui se sont succédé depuis quarante-huit ans. L’année 987, après l’empoisonnement de Ludwig-le-Fainéant, Hugh se fit sacrer roi de France par l’Église ; il usurpait ainsi la couronne de Karl, duk de Lorraine, oncle de l’époux de Blanche, l’adultère empoisonneuse ; cette usurpation amena de sanglantes guerres civiles entre le duk de Lorraine et le roi Hugh-le-Chappet. Celui-ci mourut en 996, laissant pour successeur son fils Roth-bert (ou Robert, comme on dit maintenant), prince imbécile et pieux ; son long règne fut continuellement troublé par les luttes acharnées des seigneurs entre eux : Comtes, Duks, Abbés ou Évêques, retranchés dans leurs châteaux-forts, désolèrent ainsi le pays par leurs brigandages et leurs massacres. Le roi Robert, fils de Hugh, mourut en 1031, son fils Henrich Ier lui succéda. Son avènement au trône amena de nouvelles guerres civiles soulevées par son frère à l’excitation de sa mère. Un autre Robert, surnommé Robert-le-Diable, duk de Normandie (il descendait du vieux Rolf-le-Pirate), prit part à ces combats et se rendit maître de Gisors, de Chaumont et de Pontoise. Vint enfin l’année 1033, où se sont passés les terribles événements que je dois raconter, événements inouïs, incroyables... et pourtant, avant ces temps maudits, je croyais avoir assisté à un spectacle sans pareil, parmi les siècles passés et peut-être parmi les siècles futurs ; je veux parler des derniers mois de l’an 1000, époque fixée par la fourbe cupidité de l’Église catholique comme le terme assigné à la durée du monde ; grâce à cette jonglerie infâme, le clergé extorqua les biens d’un grand nombre de seigneurs franks, nobles hommes encore plus religieusement hébétés que pillards et féroces. Pendant ces derniers mois de l’an 1000, l’on vit une immense saturnale, où se déchaînèrent les passions, les croyances, les actes les plus contraires, les plus insensés, les plus bouffons, les plus atroces !


Voici venir la fin du monde ! — disaient les prêtres catholiques ; — saint Jean l’Évangéliste ne l’a-t-il pas prophétisé dans