Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 6.djvu/52

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sion du Seigneur ; et tous, y compris l’abbé, qui avait enfin retrouvé la voix, s’écrièrent : — Dieu tout-puissant, aie pitié de nous ! délivre-nous de ces païens ! de ces démons ! Hélas ! hélas ! que de maux vont fondre encore sur les serviteurs de ton Église ! que de ravages ! que de désastres ! Nos biens, nos richesses vont encore être pillés par ces abominables sacrilèges ! Ô Seigneur ! Seigneur ! délivre-nous des North-mans !

Fultrade entra au milieu de ces malédictions lamentables. Il semblait sombre, irrité ; son visage était enflammé. Le Comte s’écria : — Arrive donc, Fultrade ; depuis une heure je te fais chercher ; tu es ici le seul homme de main et de conseil. — Puis, s’adressant à l’abbé : — Fortunat, mets un terme à tes lamentations et à celles de ton entourage ; il faut agir et non gémir...

Les prêtres continrent à grand’ peine leur désolation, tandis que le Comte de Paris, s’adressant particulièrement à Fultrade, sur l’énergie duquel il semblait surtout compter : — Que l’on ne m’interrompe pas, les moments sont précieux... Les North-mans ont reparu à l’embouchure de la Seine ; on les dit commandés par un de leurs plus intrépides rois de la mer, nommé Rolf. Leur flotte est si nombreuse, qu’elle couvre toute la largeur de l’embouchure de la Seine ; ils ne doivent pas être maintenant à plus de dix ou douze lieues d’ici !

— Et comment n’a-t-on pas été plus tôt prévenu de l’arrivée de ces maudits ? — s’écria le chantre. — Ils ont passé à Rouen, comment les gens de cette cité n’ont-ils pas, de proche en proche, fait répandre l’alarme ?

— Eh ! qu’importe aux gens de Rouen ! N’ayant pas été cette fois attaqués par les North-mans, ils n’ont eu souci des autres contrées ; ce soir seulement j’ai été averti de l’approche des pirates par quelques messagers des seigneurs et abbés riverains de la Seine ; ils m’ont de plus appris que cette vile plèbe rustique, qui n’a rien à perdre, se montre partout joyeuse des maux dont ces païens vont