Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 8.djvu/14

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servie, dégradée, torturée durant des siècles, était celle de Jacques Bonhomme, qui, après des maux inouïs, va se venger enfin de ses bourreaux séculaires ! Châtiment terrible ! Expiation légitime, légitime comme la justice des hommes qui punit le meurtrier par le supplice, légitime comme la justice de Dieu qui frappe enfin le criminel longtemps impuni.

La première de ces légendes a été écrite par moi, Mahiet-l’Avocat vers la fin de l’année 1358 ; il y a de cela aujourd’hui près de soixante et seize ans : car j’avais alors vingt-quatre ans. J’ai continué notre chronique à dater de 1300, époque de la naissance de mon père inscrite par mon aïeul sur nos parchemins. Ce sont les dernières lignes que sa main ait tracées.




LE TRÉPIED DE FER ET LA DAGUE.


1300-1360.


Avant de commencer ce récit, fils de Joel, quelques mots sur les événements accomplis en Gaule depuis l’année 1300. — À Philippe-le-Hardi, mort en 1285, avait succédé Philippe-le-Bel. Spoliation et fausse monnaie : ces mots résument le règne de ce roi d’une insatiable cupidité. Les Lombards et les Juifs sont chassés de la Gaule et dépouillés de leurs biens ; les bourgeois, les marchands, les vilains jusqu’au clergé, sont écrasés de taxes, et s’ils ne peuvent les payer, leurs biens sont confisqués ; impitoyable à la curée, Philippe-le-Bel, malgré sa guerre incessante contre les Anglais, veut mettre à contribution la Flandre, pays libre, éclairé, industrieux et fort peu, catholique ; mais Pierre Kœnig, vaillant plébéien, doyen de la corporation des tisserands de Bruges, se mettant à la tête de ses confrères et des autres corps d’artisans, châtie si rudement Philippe-le-Bel et sa che-