Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 8.djvu/33

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sonnera peut-être plus tôt que vous ne le pensez, surtout s’il est beaucoup de serfs résolus comme vous !

— Il y en a, — répondit le vieux paysan toujours à voix basse, — Jacques Bonhomme est à bout…

— C’est pour m’assurer de ce fait que je suis venu en ce pays, — dit Mahiet à l’oreille de Guillaume sans être entendu d’Alison. — Silence, espoir et courage !

Le vieux paysan, de plus en plus surpris de rencontrer dans Mahiet un auxiliaire inattendu, attachait sur lui son regard pénétrant ; car, habitué à la défiance par le servage, il craignait d’être abusé par les promesses d’un inconnu. Soudain le tintement de la cloche de l’église de Nointel se fit entendre. La cabaretière tressaillit et dit : — Ah ! je n’aurai jamais le courage d’assister à la cérémonie !

— Que voulez-vous dire ? — demanda Mahiet, tandis que les hommes rassemblés dans la taverne sortaient précipitamment en disant : — Courons au parvis…

— Ils vont assister à l’amende honorable du pauvre Mazurec, — reprit Alison.

— J’aurai plus de courage que vous, bonne hôtesse, — répondit Mahiet en reprenant son épée, son casque, et cherchant des yeux Guillaume Caillet qui avait disparu, — je serai témoin de cette triste cérémonie, car pour plusieurs raisons, le sort de Mazurec m’intéresse. Le tournoi ne commencera qu’après la messe, j’aurai le temps de revenir ici chercher mon cheval, afin d’aller ensuite me faire inscrire par le juge d’armes comme votre défendeur contre ce coquin de Simon-le-Hérissé.

— Mon Dieu, messire, il n’y a donc aucun moyen d’empêcher le duel judiciaire de ce pauvre Mazurec… Hélas ! pour lui, c’est la mort !…

— Et s’il refuse le combat, il sera noyé ; telle est la loi des Français qui régit la Gaule, honnête et humaine loi s’il en fut ; mais je pourrai, je l’espère, donner à Mazurec quelques bons avis. Je vais