Page:Sue - Les mystères de Paris, 10è série, 1843.djvu/334

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visage, étudiez les symptômes du mal, fouillez la plaie, pansez-la et vous aurez fait votre devoir.

Eh ! mon Dieu, dites-nous, ne faut-il pas journellement une grande somme de courage à M. Sue, qui est un des jeunes, un des riches, un des heureux de la phalange littéraire, pour aller attrister ainsi son âme au spectacle des vices, son cœur au tableau des misères ? car il nous l’écrivait ces jours derniers : « Le seul mérite de ce livre est d’être vrai et je n’ai rien écrit que je n’aie vu. » Allons donc, ne blâmez point le laboureur qui défriche la lande inculte et pleine de mauvaises herbes, afin de grossir les gerbes de votre moisson.

Mais, sans le vouloir, nous nous laissons entraîner à défendre M. E. Sue, comme si ses paroles dont nous ne sommes qu’un insuffisant écho en avaient besoin.

Ne craignons pas de suivre l’auteur à Saint-Lazare, prison des voleuses et des prostituées, visitée souvent par de grandes dames.

« Ces femmes élevées au milieu des splendeurs de la fortune, ces femmes, à bon droit comptées parmi la société la plus choisie, viennent, chaque semaine, passer de longues heures auprès des misérables prisonnières de Saint-Lazare ; épiant dans ces âmes dégradées la moindre aspiration vers le bien, le moindre regret d’un passé criminel, elles encouragent les tendances meilleures, fécondent le repentir, et par la puissante magie de ces mots : devoir, honneur, vertu, elles retirent quelquefois de la fange une de ces créatures abandonnées, avilies, méprisées. »

N’est-ce pas un touchant et beau spectacle que ces femmes du monde déviant de leur route sablée et fleurie