Page:Sue - Les mystères de Paris, 8è série, 1843.djvu/189

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faim ; il aurait aussi bien fait de le laisser mourir. Comme Gringalet était faible, il était peureux ; et comme il était peureux, il était devenu la risée et le pâtiras des autres petits montreurs de bêtes qui le battaient et lui faisaient tant et tant de misère qu’il en serait devenu méchant, si la force et le courage ne lui avaient pas manqué.

» Mais non… quand on l’avait beaucoup battu, il pleurait en disant : — Je n’ai fait de mal à personne, et tout le monde me fait du mal… c’est injuste… Oh ! si j’étais fort… et hardi !… — Vous croyez peut-être que Gringalet allait ajouter : — Je rendrais aux autres le mal qu’on m’a fait. — Eh bien ! pas du tout… il disait : — Oh ! si j’étais fort et hardi, je défendrais les faibles contre les forts, car je suis faible, et les forts m’ont fait souffrir !…

» En attendant, comme il était trop puceron pour empêcher les forts de molester les faibles, à commencer par lui-même, il empêchait les grosses bêtes de manger les petites… »

— En voilà-t-il une drôle d’idée ? — dit le détenu au bonnet bleu.

« — Et ce qu’il y a de plus farce — reprit le