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Aussi, plus tard, les écoliers de l’instituteur, devenus hommes, éprouvaient un certain orgueil à servir la France, lorsque venait l’heure du recrutement ; c’est librement, fièrement, qu’ils payaient l’impôt du sang, au lieu de tâcher à lui échapper en se jetant dans les bois, pour y mener une vie de révolte et de vagabondage ; aussi les gens les plus hostiles à l’instituteur avouaient que, depuis dix ans qu’il avait action sur l’éducation des enfants, les réfractaires, autrefois si nombreux dans le pays, devenaient de plus en plus rares.

Encore une preuve frappante de l’influence de l’éducation, incomplète sans doute, mais remplie d’honorabilité, si cela peut se dire, que Claude Gérard était parvenu à donner à ces enfants, grâce à des prodiges d’intelligence, de dévoûment et de volonté.

Voici un fait bien remarquable :

La révolution de juillet éclata : dans beaucoup de provinces (la nôtre fut du nombre) il y eut quelques velléités de troubles, bientôt comprimées ; certains souvenirs de la révolution furent exploités par quelques hardis meneurs ; de malheureux paysans plongés dans la misère, dans l’ignorance, jaloux et haineux parce qu’ils étaient misérables et exploités, se laissèrent entraîner à des pensées de violence ; une partie de la population de deux communes voisines de la nôtre, s’étant soulevées aux cris de Guerre aux châteaux ! vinrent chez nous afin de recruter des jeunes gens pour marcher sur un magnifique château, situé à quelque distance de notre village, et occupé par un propriétaire jouissant d’une fortune considérable.

Je n’oublierai jamais cette journée, dont le résultat