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les plus hideuses dépravations, à ceux-là tant de privations, tant de misères, que, dans leur désespoir, ils n’aient souvent le choix qu’entre l’infamie ou la mort…

Mais bientôt, songeant à la vanité de ces récriminations contre un sort inflexible, et me rappelant les enseignements de Claude Gérard, — voici l’heure de les mettre en pratique, — me dis-je, — résignation, courage, travail et respect de soi ; que ces mots me soutiennent, et qu’aux bonnes résolutions qu’ils m’inspireront se joigne l’influence du souvenir de Régina, nom sacré qu’un si triste hasard vient de rappeler encore à ma mémoire.

Étoile radieuse et pure, vers laquelle je dois toujours lever les yeux, du fond des plus fangeuses ornières de la vie.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Je ne pouvais rester plus long-temps à la porte de ce cabaret ; la rue était alors déserte, une neige fondue, tombant en brume épaisse, pénétrait mon habit et me glaçait jusqu’aux os ; le cocher m’avait dit que je trouverais, un peu avant d’arriver à la barrière, le garni où on logeait à quatre sous la nuit. Je descendis la rue à la vacillante clarté des réverbères qui, perçant la brume, se réfléchissait en pâles sillons sur la chaussée noire de boue.

Je marchais depuis dix minutes environ, lorsque je rencontrai un chiffonnier, qui, la hotte sur le dos, lanterne et crochet en main, fouillait les tas d’immondices déposés dans l’angle des bornes. Craignant de m’égarer, je lui demandai s’il connaissait près de là une maison où on logeait à la nuit.