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fond de la loge paternelle, refuge inviolable où, ne sachant que faire, j’étudiais. Mais, une fois l’élève de M. Raymond, non-seulement je continuai de travailler pendant les récréations, mais je travaillai les dimanches, les jours de fête, me couchant à minuit, me levant à cinq heures ; il n’y avait pas même de vacances pour moi : je travaillais sans repos ni cesse. Par suite de cette continuelle tension d’esprit, j’étais presque toujours en proie à d’horribles maux de tête, mais je n’osais avouer ces douleurs, je les surmontais et je continuais de piocher à outrance.

En un mot, ce digne M. Raymond me mettait pour ainsi dire en serre-chaude, afin d’obtenir de moi, par un labeur forcé, tout ce que mon intelligence pouvait donner de fruits précoces. Ce cher homme croyait sans doute qu’après une ou deux saisons la plante s’étiolerait, épuisée par cette production trop hâtive ; peu importait à M. Raymond, pourvu que l’effet fût produit sur le public. Chétif et débile, comment résistai-je à ces travaux exagérés, à ces souffrances physiques presque continues ? Je ne sais. Mais je continuai de florir à chaque été scolaire et à courber tous les ans sous le poids des palmes universitaires.

» M. Raymond triomphait ; chaque année on pouvait lire dans les journaux cette réclame triomphante :

» L’élève Léonidas Requin qui vient encore d’obtenir trois prix au grand concours, et cinq prix au collège Louis-le-Grand, appartient à la fameuse institution Raymond, boulevard Mont-Parnasse. Nous n’avons pas besoin de recommander cette excellente maison d’éducation à la sollicitude des parents, etc., etc.